lundi 20 août 2012

La cité du joueur d'échecs

Petropolis est une ville brésilienne située à moins de 50 kilomètres de Rio de Janeiro. On peut, toute proportion gardée, le comparer à un petit Versailles, puisque le deuxième et dernier empereur du Brésil (Pierre II, fils de Pierre I qui donna son nom à la ville) y a fait construire un palais d'été au milieu du XIXème siècle. Elle se situe en haut d'une colline, et c'est bien pour cette raison que Pierre II a décidé d'y élire domicile durant les mois estivaux: la température y est alors beaucoup plus supportable qu'en plaine.

Pour les mêmes raisons climatiques, une communauté allemande assez importante réside toujours dans cette ville de plus de 300000 habitants. Une fois par an, au début du mois de juillet, elle organise pendant 10 jours sa "Bauernfest", qui correspond non pas à la fête du joueur d'échecs Christian Bauer, ni à celle des pions d'échecs, mais à la fête des paysans (Bauer a les deux significations en allemand, "pion" et "paysan"), fête allemande où la bière coule à grands flots.

Une fête au Brésil

Or, cette ville impériale n'a pas seulement une importance particulière pour les alcooliques teutons, mais également pour nous, joueurs d'échecs. C'est en effet ici que l'auteur autrichien Stefan Zweig a écrit sa toute dernière oeuvre de fiction, oeuvre littéraire qui comme nulle autre a donné ses lettres de noblesse à notre jeu: Le joueur d'échecs.

LE jeu d'échecs de la nouvelle Le Joueur d'Echecs!

Depuis fin juillet 2012, la maison de l'auteur où celui-ci rédigea ses ultimes ouvrages, la casa Stefan Zweig, est ouverte aux visites. Ayant appris cela, nous n'avons pas hésité une seconde, et sommes venus derechef la découvrir.

Panneau d'accueil à l'entrée de la maison de Stefan Zweig

L'émotion est grande en parcourant les quelques pièces qui composent ce lieu chargé d'histoire: Stefan Zweig a quitté l'Europe en compagnie de sa 2ème épouse à cause de la IIème guerre mondiale. Juif et auteur de langue allemande le plus traduit durant la 1ère moitié du XXème siècle, Zweig a été une des toutes 1ères victimes de l'autodafé hitlerien.

L'image de Stefan Zweig face à son jeu d'échecs

Il a été émerveillé par le Brésil, pays qu'il découvrit dans les années 1930, si bien qu'il lui a dédié un essai au titre célèbre, Brésil, le pays du futur.

C'est dans cette véranda que Zweig rédigea la majeure partie
de sa nouvelle qui, par le biais du jeu d'échecs,
décrit notamment la perversion du nazisme

Zweig y est tellement élogieux à l'égard de son pays d'accueil, que certains critiques de l'époque lui ont reproché d'avoir conçu une oeuvre de propagande à la demande du président de l'époque, le président à la main de fer Getúlio Vargas (celui qui a inauguré le fameux Christ Rédempteur, sur la colline du Corcovado), chose que l'écrivain a toujours nié.

La maison vue de l'extérieur

Dans cet ouvrage, il est notamment écrit que le Brésil (et la capitale de l'époque, Rio de Janeiro) est un pays très silencieux, où la population n'est en rien abrutie par la passion du sport spectacle comme c'est le cas en Europe. Les Brésiliens y sont décrits comme des êtres très courtois, et retenus dans leurs actions. Le pays entier se caractérise par son pacifisme et les très rares cas d'homicide se limitent à des crimes passionnels. Même une visite dans une favela se déroule en tout repos et ne représente aucun danger.

Je vous laisse juge quant aux capacités prophétiques de Zweig...

Un visiteur, amateur d'échecs et admirateur de Stefan Zweig,
spécialement venu de France


C'est aussi dans cette maison que Stefan Zweig, désespéré des boulevesements mondiaux, âgé de 61 ans, décida de mettre fin à ses jours, en compagnie de son épouse.

La pièce dans laquelle les époux Zweig se donnèrent la mort
Une copie de la lettre d'adieu de Stefan Zweig écrite en Allemand

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